Bonjour à tous,
Je voulais partager avec vous un texte que j'ai écrit cette semaine à la suite d'un événement qui a eu lieu dans ma ville.
Le 26 mai 2021, à Hayange, j'ai assisté à une marche blanche organisée en l'honneur de Stéphanie, une jeune maman de vingt-deux ans, tuée sous les coups de son ancien petit-ami. C'est le 43e féminicide en France cette année. Cette situation est révoltante et nous émeut tous. Cette jeune femme, je ne la connaissais pas personnellement, mais je ressens beaucoup de compassion pour elle. Je me sens proche d'elle. Je suis persuadée qu'aucune femme n'est à l'abri d'une mauvaise rencontre. Ce qui m'a le plus choqué dans cette histoire, c'est la réaction de mon entourage. Les gens jugent facilement. L'ancien compagnon de Stéphanie est un homme d'origine étrangère, multi-récidiviste... un homme déjà violent par le passé. Stéphanie avait déposé une plainte pour menaces de mort et violences conjugales. Le soir du drame, il sortait de prison et elle l'a accueilli chez elle. Pourquoi lui a-t-elle ouvert la porte ? Pourquoi avoir fait entrer de nouveau ce monstre dans sa vie ? Ce sont des questions auxquelles on n'aura jamais de réponse, mais l'être humain est complexe et on doit bien se garder d'émettre un jugement.
Mon opinion est la suivante : je pense que cette jeune femme était très seule. Peu de famille était présente à la marche blanche. Beaucoup d'amies mais peut-être n'a-t-elle pas trouvé les bons conseils, la force sur laquelle s'appuyer.
Toujours est-il que cette situation est dramatique et m'a beaucoup émue. J'ai voulu exprimer mon ressenti par ces quelques mots :
Trouver les mots justes ou se taire.
Fleurir ou continuer son chemin en oubliant.
Rien ne sera jamais. Crier, pleurer, se résigner.
Mais ça monte tout seul. Une déchirure, une injustice, une colère.
Ça fait des mots qu'on laisse s'échapper, des mots cassés dans un silence qu'on ne peut tolérer.
Et cette envie de dire, comme un hymne, une phrase simple, toute simple
Parmi ces femmes qui sont réunies, une rose à la main :
Ton visage est celui de ma sœur, ton visage est le mien.
Toujours, se battre, toujours se taire.
Toujours à se faire regarder par un monde qui ne comprend pas.
On baisse la tête ; on meurt d'effroi.
Des centaines de blessures à porter sur un corps décharné.
Des milliers de " je t'aime mais un jour, je partirai".
Ce que l'on perd chaque jour à trop pardonner.
Et puis une dernière question, un dernier pourquoi,
Une dernière étincelle qui meurt.
Il y avait pourtant du soleil dans tes yeux, des sourires dans ta voix.
Un rêve de petite fille brisée,
Un combat pour une autre âme à jamais déconsolée.
Ton prénom à présent se nourrit en l'obscurité.
Ce que l'on perd chaque jour à s'abandonner.
Stéphanie, tu rejoins des visages qu'on ne voudrait plus voir.
Mais on va continuer de sourire, de créer puis de crier.
On va continuer de se battre, de porter ce bagage-là,
De porter le visage d'une meute qui survivra.
Ton visage est celui de milliers de femmes aussi fortes que brisées.
Trop souvent invisibles ; trop souvent ignorées.
On se réveille trop tard. "Et si…" C'est le Destin qui s'en est mêlé. Elle avait qu'à l'oublier et laisser la porte fermée.
Alors que faire ? Comment lutter contre l'incompréhension et l'inhumanité ? Où est le remède ?
Il est peut-être là, l'espoir, me semble.
Il tient dans une main qu'on peut tendre.
Il tient dans un sourire bienveillant qu'on peut donner.
"Viens, je te prends, je vais t'emmener".
Loin d'ici, loin de lui, loin de tout ça,
Qui peut prétendre ne pas être à l'abri du drame ?
Un sourire, une rencontre, un masque bien porté.
Quel est le monstre qui se cache derrière ces baisers ?
Alors avant les fissures ouvertes sur la gorge,
Avant la peine, le doute et les remords,
Avant les "si j'avais su… ah oui c'est arrivé ?"
On peut peut-être s'entraider.
Le monde ne le sait pas,
Mais ça peut arriver.
Simplement dire "je suis humaine"
Et s'avancer.
Créer des fleurs qui nous ressemblent,
Dérouler l'étoffe de nos rêves,
Continuer à composer dans ce vertige ordinaire.
Et même si écrire peut paraître absurde,
Comme n'importe quel cri se heurtant à un mur.
On peut quand même le faire,
Et espérer,
Porter une histoire, des rires envolés,
Et ne pas abandonner.
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